- BUNCHO (TANI)
- BUNCHO (TANI)Peu connu des historiens d’art occidentaux, Bunch 拏 fut considéré par ses contemporains comme le plus grand peintre japonais de son temps. Mais il est malaisé de le classer dans une école. S’il a tout du lettré, vaste culture, formation intellectuelle (confucéenne), son art dépasse le cadre de l’école des Lettrés dite Bunjinga ou Nanga. Faut-il le considérer comme un rénovateur de génie de l’école Kan 拏, qui a su assimiler les traditions sino-japonaises ? En fait, son œuvre très abondante et composite reflète toutes les tendances picturales de son époque. L’éclectisme surprenant de Bunch 拏 peut s’expliquer par sa formation artistique, sa culture et sa curiosité, son souci de la synthèse et la subtilité de son talent.L’influence chinoiseTrès jeune, il manifesta des dispositions pour la peinture, que son père, samouraï et fin lettré, lui fit apprendre chez Kat 拏 Bunrei (1706-1782). Ce dernier le forma aux traditions de l’école Kan 拏. Mais cet adolescent talentueux ne pouvait suivre l’enseignement d’une école vivant d’une tradition bien établie sans chercher à la renouveler. Esprit curieux, le jeune Bunch 拏 voulut parachever sa formation et diversifier sa technique au contact d’autres sources. Tout naturellement, il se tourna vers la peinture chinoise, qu’on regardait alors avec des yeux neufs, et tout spécialement vers l’école du Sud dite des Lettrés, méconnue au Japon jusqu’en ce XVIIIe siècle. Un voyage à Nagasaki, qu’il entreprit à l’âge de vingt-cinq ans, eut une influence décisive sur son orientation, en lui ouvrant de nouveaux horizons. Au cours de ce voyage, il s’initia à l’esthétique des Lettrés et subit l’influence du peintre chinois Chang Cougu dont il devint l’élève. À la même époque, il rencontra Shiba K 拏kan (1747-1818), qui l’introduisit dans les ateliers qui pratiquaient la peinture européenne à Nagasaki.Sans être un véritable théoricien, Bunch 拏 explique dans ses écrits comment il devint et comment on peut devenir un maître. Pour lui, il faut d’abord apprendre son métier au contact des Anciens et copier sans relâche leurs œuvres afin d’en pénétrer le secret, puis observer la nature en essayant de traduire ses moindres nuances, enfin confronter puis synthétiser ces deux expériences. Le peintre, riche d’un tel bagage, cherchera son style en créant ses premières œuvres personnelles. Cette ligne de conduite fut celle que Bunch 拏 observa toute sa vie. Ainsi copia-t-il toutes les écoles et tous les grands maîtres passés et contemporains et pratiqua-t-il tous les genres: de l’école classique (yamato-e ) à Hanabusa Itch 拏 et Maruyama 牢kyo, au Japon; des maîtres de l’époque Song à ceux de l’époque Qing, en Chine; de l’art du paysage à celui du portrait en passant par la peinture bouddhique et par celle de fleurs et d’oiseaux. De ses nombreux voyages, il nous laissa quantité d’albums, révélant l’observateur pénétrant et le grand amoureux de la nature.Les œuvres monumentalesDe cette expérience sont nées des œuvres dont la diversité peut surprendre. Le Honch 拏 Gasan ou le Shuk 拏 Jisshu , œuvres monumentales de compilation sur l’art du passé en Chine et au Japon, le K 拏yo Tansh 拏 , série de paysages réalistes vus dans une perspective d’une exactitude scientifique, les deux rouleaux supplémentaires du Ishiyama-dera Engi , de style purement yamato-e , montrent son génie d’assimilation. Mais sa grande ambition fut d’unifier, dans une forme nouvelle, les deux tendances fondamentales de la peinture chinoise: le style académique de l’école du Nord et celui de l’école du Sud ou des peintres lettrés.La diversité de son œuvre rend l’analyse de son style plus difficile encore. Cependant, on peut avancer qu’à une écriture minutieuse, précise et soignée, qui caractérise les peintures de sa jeunesse et de sa maturité, succéda un style plus relâché, brusque et d’un métier moins raffiné. S’il fut d’abord très attiré par l’école du Sud, il se rapprocha de plus en plus par la suite de l’école du Nord avec laquelle il semble avoir plus d’affinité. Excellent technicien, peintre de grand talent, il lui manqua la force et la vigueur des maîtres du passé. N’ayant pas leur génie, ses œuvres restent d’excellentes copies; fidèles par l’atmosphère, elles manquent de souffle créateur.Ses contemporains prisèrent sa peinture au point de l’appeler le nouveau Tany ou de le comparer aux grands maîtres de l’époque Ming. Peintre très sollicité par les milieux officiels du sh 拏gunat, il connut de son vivant la gloire et la fortune. Maître écouté, il eut d’innombrables élèves. Mais, malgré son talent incontestable et sa faculté étonnante d’assimilation, il ne parvint ni à réaliser une véritable synthèse de tous les apports dont son art était fait, ni à fonder une véritable école.
Encyclopédie Universelle. 2012.